DU STYLE, DE L’IMAGE, DE LA MODE : DE MATTHÄUS SCHWARTZ, THE FIRST FASHION BOOK À EUPHORIA, EUPHORIA FASHION (2019), UNE MÉCANIQUE DES STYLES
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DU STYLE, DE L’IMAGE, DE LA MODE : DE MATTHÄUS SCHWARTZ, THE FIRST FASHION BOOK À EUPHORIA, EUPHORIA FASHION (2019), UNE MÉCANIQUE DES STYLES
Ici, il ne s’agira pas d’aborder le choix d’un bon motif, comme il en a été question déjà à la bibliothèque Forney lors d’une exposition et d’un catalogue édités il y a quelques années, mais de regarder la manière dont l’écriture textile se déploie et engage l’apparition de l’image depuis la technique, sur et dans la surface. Depuis les savoir-faire telle que la tapisserie ou depuis la mode avec la technique de la sublimation, en cherchant, en créant, nous aborderons la dimension prospective de l’identité textile et de ce que peut l’image appliquée pour la mode et les arts de vivre. Si l’on pose le trompe l’œil textile comme un point d’entrée, mais plus globalement la figuration sur l’étoffe d’un dessin ou d’une tache, quels qu’en seraient la nature du tissu ou du sujet représenté, cette image appliquée pose des questions de résolutions, de netteté, de traduction qu’il nous semble intéressant d’explorer ensemble.
Fil de la conférence,
A. Figuration, un réalisme photographique ?
B. Un jeu d’impressions par sublimation
C. Tapisserie_HIFI & transduction_Haute fidélité ?
D. HIFI renversée_Transcrire l’imagerie numérique dans la tapisserie - une lumière d’écran ?
E. Enchâssements_ Des modéles de réalité comme des médiums en mouvements.
ART.S DE VIVRE
Fil de la discussion,
A Projets d’exceptions, commandes & savoir-faire. Du singulier au particulier, une écriture en variation.
B Matières, matériaux, métiers. Le faire décoration par les gestes qualifiés sur une matière choisie. La matière aux défis.
C Échelle, assemblage et total look, l’ensemblier comme virtuose des savoir-faire.
Fil de la discussion,
A L’objet scénographique et les savoir-faire.
B De l’objet fini au processus, la scénographie comme démonstrateur et mise en lumière des savoir-faire eux mêmes.
C Archive vivante et Patrimoine vivant - Penser et transmettre le savoir-faire, une logique de création et de recherche.
La collection Carrés d’Aubusson a l’ambition de produire en tapisserie d’Aubusson, une série d’œuvres contemporaines d’une surface approchant les 3,5 m2. Chaque objet produit, par sa valeur patrimoniale et tout autant contemporaine, fait figure d’œuvre tableau, carré, écran, fenêtre picturale à échelle domestique.
La pertinence d’un format plus petit de tapisserie tient à la valeur de proximité et quotidienne que ces œuvres produites pourraient prendre dans l’intérieur du collectionneur / propriétaire et de la mobilité inhérente à la taille de cette œuvre au sein de l’habitat. En des termes plus concis, une œuvre de taille raisonnable est plus facile à intégrer dans un intérieur domestique, ce qui fait rediscuter la monumentalité attachée à la tapisserie patrimoniale.
Cette possible valeur décorative renoue avec l’usage de la tapisserie. En proposant une sélection d’artistes contemporains, dont la traduction du langage plastique interroge avec pertinence l’écriture du point de tapisserie, du textile en général et des qualités intrinsèques d’une image, on crée autour de cette spécificité une collection emblématique, une série domestique de tapisseries d’Aubusson.
La collection Carrés d’Aubusson concerne des tapisseries de petites dimensions (1,84m x 1,84m) destinées à l’intérieur intime et produites en lien étroit avec des galeries d’art contemporain.
Mathieu Buard en assure la direction artistique. Les artistes sélectionnés ont vocation à proposer des œuvres pleinement pensées « tapisserie » (points, matières, couleurs) et renouvelant la place de ce médium sur le marché de l’art.
Cette collection a pour vocation d’être en lien avec les galeries d’art internationales, et d’être au centre des actions menées dans l’objectif de repositionner la tapisserie d’Aubusson auprès des acteurs du marché de l’art.
La collection est soutenue par la Fondation Bettencourt Schueller, dans le cadre de l’attribution du Prix Liliane Bettencourt pour l’intelligence de la main® – Parcours 2018 à la Cité internationale de la tapisserie et son Directeur.
Le fonds contemporain de la Cité de la tapisserie d’Aubusson accueille désormais une collection spécifique, les Carrés d’Aubusson, qui invite des artistes contemporains reconnus à développer une tapisserie de format carré relative aux échelles domestiques d’un mètre quatre-vingt quatre de côté, soit d’environ 3,40 mètre carré. Le fonds contemporain prolonge et redéploye par cette collection de Carrés et les écritures textiles actualisées qu’ils portent tous, les savoir-faire du point d’Aubusson reconnu comme patrimoine immatériel universel de l’UNESCO.
Le propos de la collection interroge de frontalement la tapisserie, ses représentations comme ses techniques. Il s’agit de proposer une vision actuelle de la tapisserie, à l’instar de la céramique, comme segment vivant de l’art contemporain ; œuvre à part entière pour les artistes autant que médium de création depuis ce patrimoine et savoir-faire. Il s’agit aussi de développer une vision prise dans le champ élargi et actuel d’une intégration pleine et complète des arts décoratifs, c’est-à-dire jouxtant les porosités d’une pratique qui étend son langage plastique à une pluralité de formes et formats, de médium en médium, dans une multitude de manière de se représenter ; enfin de montrer la matière textile comme le potentiel puissant d’un dépassement des savoir-faire vers un devenir art.
La relation de l’œuvre tissée par l’artisan et de l’artiste qui produit le carton ou disons l’image source, est l’un des particularismes de la tapisserie, et cela pose des questions très actuelles de la signature comme de l’affirmation d’une réalisation, ou collaboration étroite, co-édition intime même entre une écriture artistique et une identité textile ; l’objet premier de cette collection de Carrés d’Aubusson tient de cet échange et de cette recherche d’une surface tissée prospective et cohérente avec les modalités de représentations ou figurations que suppose une traduction sinon une transcription d’une modèle de réalité à un autre. L’ambition se situe dans le recherche par le fil, la matière, le tissage, mais aussi dans l’œuvre choisie de trouver les territoires limites, les interstices et les bords qui permettent de faire de la tapisserie un laboratoire et un lieu d’expression contemporain.
La tapisserie porte des enjeux très immédiats de codification, de transit d’un médium dans un autre et de la poursuite d’une figuralité, re-présentation dont l’écart de matérialité est constitutif, assumé même. Il s’agit de trouver la justesse dans la matière textile d’une équivalence ou d’une correspondance quasi analogique à l’œuvre de départ, dite source.
La somme des quatre premiers Carrés interrogent cette identité textile trouvée pour chacune des œuvres interprétées. Mais, à la différence du carton traditionnel qui prépare la transcription ou passage de l’œuvre source à l’œuvre tissée, les quatre œuvres des artistes invités proposent une interprétation plus complexe, où le carton n’est pas le guide stable et définitif, mais une question textile adressée au lissier. Ainsi, chez Romain Bernini, l’œuvre source est déjà une surface textile, avec un armure particulière, un jeu de taches colorées intranscriptibles in extenso, et un format qui suppose un agrandissement donc l’interprétation des détails et de leurs échelles. De la même manière, les plans picturaux aux écritures si différentes de l’œuvre de Raúl Illarramendi demandent des traductions et des identités textiles toutes renouvelées sinon contradictoires au regard des traces et gestes abstraits qu’il peint. L’enjeu de lumière, aussi, vient complexifier la simple traduction d’un état de texture en un point tissé. Encore, l’aspect changeant et atmosphérique de l’œuvre de Jean-Baptiste Bernadet dépasse de loin ce qu’un lissier a comme marge d’interprétation, ici totalement libre, de trouver avec un nombre de couleurs de fils très limité, une surface atmosphérique et changeante. Enfin avec l’image numérique qu’Amélie Bertrand propose, et où la colorimétrie est un étalonnage digital de l’écran, un colorama dont le référentiel est l’écran : c’est-à-dire une image lumière « rétro éclairée ». Les gradians qui constituent les dégradés de l’image viennent augmenter la difficulté des passages analogiques avec les fils, les techniques de battage que la tapisserie suppose.
L’un des premiers enjeux de l’exposition est donc de présenter la vitalité de ces identités textiles, des inventions et trouvailles faites dans le champ de l’art tissé.
Un autre enjeu, complémentaire, est de montrer la transcription même, traduction ou interprétation de l’œuvre source dans et par le geste de l’artisan lissier.
Encore, il s’agit de montrer la labilité ou plasticité des écritures des quatre artistes invités, qui jouent et prennent le risque de voir leur esthétique singulière déplacée par cette traduction et de voir ainsi comme une langage artistique transite d’un médium à l’autre. Chaque Carré d’artiste est une possible ré-édition de 8 exemplaires, l’idée du multiple ou de la série, rejoint proprement le champ du marché et des éditions d’art, avec la particularité d’une grande variabilité des tissages, explicitement liée au fait main et à sa non reproductibilité technique.
Les quatre premiers Carrés textiles sont désormais tissés et n’appellent qu’à être présentés. Le projet de cette exposition de tapisseries vient donc s’inscrire dans l’actualité d’artistes contemporains et de leurs œuvres liées aux marchés et institutions artistiques qui les portent. Ainsi Raúl Illarramendi chez Karsten Greve, Jean-Baptiste Bernadet chez Almine Rech, Romain Bernini chez Suzanne Tarasiève, et Amélie Bertrand chez Sémiose, ont conçu une tapisserie en étroite collaboration avec les artisans établis dans la zone d’influence patrimoniale d’Aubusson. Chaque Carré d’artiste édité rentre de fait dans le répertoire d’œuvres de l’artiste
Aussi, dans un écho direct à la tradition des arts décoratifs et des salons d’ensembliers, il s’agit de montrer des espaces complets ou complétés de différentes œuvres des artistes où cohabiteront différents médiums : tapisserie, peinture, sculpture, céramique, objets ou éléments décoratifs qui inscrivent la tapisserie dans le champ de collections domestiques et intimes et qui pense ou déploie un art de vivre total.
Enfin, il est envisagé de présenter en même temps que l’œuvre tissée, des œuvres choisies des artistes qui accomplissent ce lien entre l’art contemporaine et les arts décoratifs.
Mathieu Buard.